Nouvelles manifestations contre Omar Hassan al Bachir au Soudan - ( FR4NC3 )

par Khalid Abdelaziz et Ulf Laessing

KHARTOUM (Reuters) – Des milliers de personnes ont appelé à la démission du président Omar Hassan al Bachir lors de manifestations organisées à la sortie de la grande prière hebdomadaire du vendredi au Soudan, où la contestation prend un tour de plus en plus politique.

A Khartoum ainsi qu’à Omdurman, la ville-jumelle sur la rive occidentale du Nil blanc, environ 3.000 manifestants ont scandé “Liberté, liberté” et “Le peuple veut renverser le régime”. Malgré un important dispositif de sécurité, la foule a marché sur le marché central en brandissant des banderoles sur lesquelles on pouvait lire “Non, non à la hausse des prix”.

A Bahri, un quartier nord de la capitale qui a été ces derniers jours un foyer d’agitation, un millier de personnes ont également manifesté. On signale aussi des manifestations dans un autre quartier d’Omdurman et de Khartoum ainsi qu’à Wad Madani, localité située au sud de la capitale.

Dans le centre de Khartoum, l’armée a déployé vendredi des camions hérissés de canons de DCA, un armement jusqu’ici réservé au Darfour. Le quartier administratif, sur les rives du Nil, est gardé par une centaine de soldats, policiers et agents en civil armés de Kalachnikov.

Deux ONG de défense des droits de l’homme -Amnesty International et le Centre africain d’études sur la justice et la paix (ACJPS)- ont contesté le bilan officiel des violences survenues lors des manifestations de cette semaine.

Des milliers de personnes ont défilé dans les rues de Khartoum et d’autres villes du centre du pays pour dénoncer la suppression, à compter du 23 septembre, des subventions publiques au prix des carburants.

AU POUVOIR DEPUIS 1989

Les manifestants se sont enhardis en dénonçant la corruption du régime et en réclamant la démission du chef de l’Etat. Ce dernier, au pouvoir depuis un coup d’Etat militaire en 1989, est recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour génocide pour son rôle présumé dans les exactions au Darfour.

Jeudi soir, la police a fait état d’un bilan de 29 morts, dont plusieurs membres des forces de l’ordre. L’opposition a évoqué pour sa part une centaine de victimes. Selon les deux ONG, qui s’appuient sur les récits de témoins, de parents, de médecins et de journalistes, ce chiffre est d’au moins 50 morts et plusieurs centaines de personnes ont été interpellées.

Parmi les morts figurerait, toujours d’après le communiqué d’Amnesty et d’ACJPS, un adolescent de 14 ans. Les autres victimes seraient pour la plupart âgées de 19 à 26 ans.

“Ouvrir le feu avec l’intention de tuer, notamment en visant la poitrine et la tête, constitue une violation flagrante du droit à la vie. Les autorités soudanaises doivent faire cesser sur le champ la répression violente menée par les forces de sécurité”, a déclaré Lucy Freeman, directrice adjointe pour l’Afrique à Amnesty International.

Human Right Watch ne fournit pas de chiffre précis mais dit dans un communiqué séparé avoir la confirmation que le véritable bilan est supérieur aux 29 morts annoncés par le pouvoir.

Aucune vérification indépendante des bilans avancés n’est pour le moment possible.

Le Soudan, qui a perdu les trois quarts de ses réserves en pétrole depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, a réussi jusqu’ici à échapper aux grandes manifestations des “printemps arabes” qui ont balayé depuis 2011 plusieurs autocrates dans la région.

Jean-Loup Fiévet pour le service français, édité par Gilles Trequesser



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